S’accorder sur les grands principes
Si les règles de la démocratie ont une réalité indépendante, elles ne s’inventent pas mais se découvrent à la lumière de l’expérience avec l’aide de la raison. Elles relèvent alors du domaine du savoir. Aristote s’était déjà penché sur la question en étudiant les trois cents constitutions de son temps. La société a en effet besoin de théoriciens pour comprendre la nature du bon régime, en attendant que la communauté des pairs fasse chorus et puisse acter ce jour-là un immense progrès.
Un savant français, Jean Baechler, a remis le travail sur le métier à la fin du XXe siècle, en puisant dans les derniers apports des grandes disciplines concernées (science, philosophie, sociologie, anthropologie, histoire politique). La forme du bon régime a évolué avec le temps mais ses fondements demeurent identiques. Les archéologues pensent d’ailleurs qu’ils étaient déjà respectés au Paléolithique, avant que la situation se dégrade sous l’effet des guerres. L’Institut pour la démocratie s’est efforcé de résumer l’essentiel de ces enseignements. Tout porte à croire que nous disposons là du corpus doctrinal le plus complet et approfondi sur le sujet.
La question n’est pas anodine à l’heure où le monde entier se réfère à la démocratie et qu’il ne reste plus qu’à savoir ce que ce mot veut dire. Pour valider ces travaux, nous proposons de réunir un collège d’experts et docteurs en démocratie supposés ou potentiels, une question à débattre dans la langue de l’auteur pour des raisons pratiques. Nous suggérons qu’un tel symposium se tienne dans un lieu symbolique et l’un des berceaux de la démocratie en Europe*. Si les résultats sont probants et que les enseignements se révèlent difficilement réfutables, une nouvelle page de l’histoire des institutions sera en passe d’être tournée. Les citoyens en mal de démocratie sauront à qui s’adresser pour faire progresser la bonne cause.
*Ce lieu pourrait être le château de Montmirail, village du Haut Maine où se tint au XIIe siècle la dernière tentative de réconciliation entre Thomas Becket et Henri II Plantagenêt à l’initiative du roi de France. L’échec se solda par l’assassinat un an plus tard de l’archevêque de Canterburry dans sa cathédrale, drame spectaculaire qui illustre la fin du conflit entre droit canonique et pouvoir temporel, tournant historique d’où émergera pour finir l’état de droit propre à la modernité. Cf. Harold Berman, Law and Revolution, Harvard University Press, 1990, traduction française : Droit et Révolution, Université d’Aix en Provence, 2002).