Créer des Clubs de démocrates
Au-delà de la réforme des institutions, une instruction civique doit permettre à tout un chacun de s’élever à la dignité pleine et entière de citoyen. La tâche n’est pas aisée car, même si le règles de la démocratie entrent en résonnance parfaite avec le sens moral de tout un chacun, il faut encore concevoir les outils pédagogiques pour qu’elles puissent imprégner durablement les esprits. A la vague et sempiternelle expression de « valeurs républicaines » – doublement impropre* – se substituera demain le sens précis des règles de la démocratie.
Ces principes fondamentaux sont appelés à être inculqués dans le cadre scolaire, au même titre que le langage, la lecture et le calcul mental, afin que les citoyens puissent de comporter en citoyens dans la vie quotidienne. Si l’on voulait en plus que des gardiens de la flamme soient disséminés dans toute la société, une forme de noblesse serait attachée à l’appartenance à de véritables Clubs de démocrates. La vertu du patriotisme pourra trouver un prolongement aux échelons politiques supérieurs. Ils finiront par fraterniser à l’échelle globale au sein des deux familles de pensée de portée universelle – l’une libérale-démocrate, portée par l’idéal des libertés, l’autre sociale-libérale, portée par le souci de réduire les inégalités.
L’adhésion aux bons principes ne fournit pas seulement des repères intellectuels, elle a aussi une vertu prophylactique, en prévenant contre le risque de pandémie idéologique. Elle apporte une défense naturelle contre les « idéo-virus », véhiculés par le simple usage de mots insidieux, comme celui de capitalisme, qui désigne négativement les libertés économiques. Celles-ci ne sont rien d’autre qu’un droit de vote sur les marchés – le mode de régulation dans le domaine privé – en faveur de ceux qui rendent le plus service. On saurait ensuite désigner à la vindicte populaire ceux qui ainsi deviennent riches.
Un Etat soucieux de protéger la population contre les idéologies – qui ont déjà coûté très cher aux Européens au XXesiècle – pourrait être fondé un jour à exiger des nouveaux entrants dans certains métiers – comme les enseignants et les professionnels de l’information, en position de forger l’opinion publique et formater des esprits encore vierges – une initiation plus approfondie aux règles de la démocratie. Un grade encore plus avancé d’ambassadeur de la démocratie, accessible au terme d’une formation spécifique, serait concevable, qui intéresserait aussi les candidats aux élections ou aux fonctions conférant une parcelle d’autorité publique.
*Une valeur s’attache à la morale et aux vertus de la personne, tandis que le mot République (Res Publica) fait référence à la chose publique sans caractériser la nature du système politique – la République romaine n’était pas une démocratie. En revanche, la notion de « principes » renvoie la raison et « démocratiques » au régime politique fondé sur cette aptitude propre à l’espèce humaine. Quand les gens parlent de République, ils font référence à la démocratie, qui se définit par des principes supérieurs de droit.